Partis il y a une quarantaine d’heures du Havre, Ian Lipinski et Julien Pulvé exploitent une des vertus cardinales des bons marins : la patience. C’est en tout cas ce qu’on imagine, depuis la terre. L’absence de vent au contournement de la pointe du Cotentin et la panne générale du « ventilateur » du nord au sud du Finistère, doivent peser sur le système. Imaginez : depuis 24 heures, le Class40 Crédit Mutuel – comme les 44 autres bateaux de la flotte – a parcouru à grand peine une centaine de milles ; une quarantaine depuis le coucher du soleil.
Depuis la mer, la perception est différente. Parce que c’est le début de course, parce que le sujet n’est pas d’établir un record de vitesse, et parce que tout le monde est logé à la même enseigne. Et puis surtout, parce que cette situation météo hyper calme sollicite la science des navigateurs. L’analyse des conditions de navigation est poussée à l’extrême pour tenter d’arracher un dixième de nœud de vitesse en plus, pour gagner 1 degré d’angle et donc s’épargner une poussière de distance en moins à parcourir… ou alors pour trouver le meilleur compromis entre le cap et la vitesse : vaut-il mieux faire un peu plus de route et gagner en vitesse ou l’inverse ?
Ian a partagé ses sensations hier après-midi : « Le jeu est hyper passionnant : ajuster les trajectoires, trouver les bons timings, envoyer les bonnes voiles au bon moment. Un coup on gagne, un coup on perd… »
Cette première partie de course aura donc été très animée malgré la toute petite vitesse moyenne : « Le départ aura été chargé en émotions : les conditions étaient toniques et pas super agréables au près en baie de Seine, ce n’était pas très ‘confort’ pour se mettre dans le rythme. A bord, nous avons dû nous occuper à caler quelques petits détails. Rien de grave, mais ils se sont enchaînés. On a eu un peu de mal à se détendre ! Petit à petit, tout est rentré dans l’ordre et la mer s’est calmée ».
La boîte à outils est rangée, on l’espère en tout cas. Ce matin, au classement de 8 heures, Crédit Mutuel était en 2e position de la flotte, en mer d’Iroise, l’étrave pointée sur le sud, avec 0,1 mille de déficit sur les leaders, c’est-à-dire rien, à 4 313 milles de l’arrivée.
Les conditions météo ne vont pas favoriser la vitesse, d’autant que le vent vient du sud, à 5 nœuds selon les prévisions. Mais au moins, nos marins n’auront plus à jouer entre les cailloux. C’est déjà une bonne nouvelle.