Au-delà de ses talents de coureur au large, Ian est aussi une plume. En cette veille d’arrivée à Salvador de Bahia, a priori en vainqueurs avec Adrien Hardy, le skipper du novateur Class40 Crédit Mutuel revient sur la genèse de ce début d’histoire partagée avec le Crédit Mutuel, sur la conception de ce très prometteur prototype et sur le déroulé de cette toute première transat idéale…
« A moins de 300 milles de l’arrivée de ma première course en Class40 à bord de Crédit Mutuel, voici un petit point à mi-chaud, mi-froid.
Bien sûr, l’incertitude du sport en général et de la course au large en particulier obligent à la prudence quant au résultat final. Néanmoins, être en tête à ce stade de la course avec une soixantaine de milles d’avance est déjà pour moi une grande satisfaction. Après une victoire sur la Mini Transat il y a deux ans, je n’étais absolument pas sûr de continuer en course au large. C’est au cours de l’hiver 2018 que les hasards des rencontres m’ont permis d’échanger avec la direction du Crédit Mutuel et, en quelques mois, de valider ce projet de construction d’un Class40 innovant.
Il fallait aller vite et bien pour respecter un timing serré. David Raison, l’architecte, s’est « tué » au travail pour dessiner son premier Class40 dans les temps. L’objectif pour lui était de répéter le coup de génie qu’il avait eu en dessinant le premier des Scows sur le circuit Mini 6.50. Ayant eu la chance de naviguer sur de tels bateaux, j’ai bien saisi les avantages incroyables qu’ils procurent : vitesse, confort, facilité d’utilisation, en particulier au large dans la mer formée et le vent fort…
Novembre 2019, fabrication des moules chez Charlie Capelle. Février 2019, début de la construction du bateau chez JPS dont la réputation n’est plus à faire. Tout l’été, nous avons aidé l’équipe du chantier comme on a pu pour accélérer les étapes et mettre à l’eau mi-août. Avec Pic, Pauline, Camille, Jérôme, Fidel, Albane… nous avons travaillé nuits et jours 7 jours sur 7, puisant dans nos réserves physiques et mentales.
La récompense était à l’eau à la Trinité-sur-mer, le 13 août, avec une question en tête : ce drôle de bateau allait-il marcher ? Pas le temps de trop se questionner, il faut enchaîner : premières navigations au programme pendant que David doit installer toute l’électricité du bateau. Pas facile pour lui quand le bateau navigue, il travaillera aussi toutes les nuits !
Adrien Hardy est alors arrivé en renfort et découvre avec nous le bateau. Tous, nous savons que le premier enjeu est de le fiabiliser le plus possible : c’est la priorité numéro une ! La deuxième priorité, c’est de fiabiliser le bateau. Et ainsi de suite…. Donc Pic, Adrien et moi, unissons nos expériences et expertises pour essayer de préparer ce bateau à traverser l’Atlantique en un temps record. Personne ne comptera ses heures, l’investissement est total.
On casse le plus de choses possible : bôme, système de safran…. Les premiers entraînements ont lieu, et nous nous rendons compte que le bateau n’est pas raté. Nous voyons bien qu’un potentiel existe, mais il n’éclate pas au visage non plus, ça ne va pas être facile…
Départ en qualif, bricolage, autres entraînements….. Et c’est déjà l’heure de partir au Havre ! Nous nous présentons au départ avec un bateau prêt, et les jours suivants démontreront toute la qualité du travail réalisé. Nous n’avons pas sorti la caisse à outils de toute la traversée !
Comme espéré, le bateau devient magique à partir de 25 nds de vent. Il vole sur l’eau et passe les vagues sans ralentir. Le pilote automatique de chez Madintec, le « Madbrain » se comporte aussi à merveille. Après être sorti de la Manche, nous ne tiendrons plus jamais la barre et battrons le record des 24h sous pilote auto ! Ce troisième homme est aussi clairement un facteur incontournable de cette performance.
Quoiqu’il arrive d’ici l’arrivée à Salvador, je suis hyper heureux du petit bout de chemin déjà parcouru et évoqué à travers ces lignes. C’est une chance immense de pouvoir mener ces projets. Je tiens à remercier infiniment le Crédit Mutuel de m’avoir fait confiance. Mille mercis aussi à Pic et Pauline qui ont tout donné jusqu’au départ, à David qui va pouvoir aller se requinquer en croisière, à Adrien de m’avoir supporté ces 15 derniers jours !
Que c’est bon de naviguer sur ces si beaux bateaux, sous la tiédeur nocturne des Alizés… Je retourne sur le pont pour profiter des dernières heures…
A bientôt à tous
Ian